Podcast : l’Agilité, le Lean et Lean Six Sigma avec Mathieu Gendaj
Dans cette capsule podcast, Norman Deschauwer, expert et conseiller en agilité, et Mathieu Gendaj, spécialiste du Lean Six Sigma, nous plongent au cœur des pratiques et des philosophies qui façonnent les entreprises d’aujourd’hui.
À travers des échanges animés et riches en enseignements, Norman et Mathieu explorent les défis et les opportunités auxquels sont confrontées les organisations dans leur quête d’excellence opérationnelle et de satisfaction client. Ils dévoilent les secrets pour transformer les processus internes et améliorer continuellement les performances, tout en mettant l’accent sur l’importance de l’implication de chaque membre de l’équipe, de garder l’humain au centre.
Mathieu fait le point sur le LEAN et la différence avec le Lean Six Sigma pour ensuite expliquer pourquoi « The Lean Six Sigma Company » propose les deux pratiques. Il nous donne aussi un aperçu de cette société hollandaise, de son historique à son extension dans pas moins de 25 pays en Europe et dans le monde !
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L’épisode offre un regard privilégié sur le rôle essentiel du Lean Six Sigma et de l’agilité dans la gestion moderne des entreprises.
De la philosophie Lean à la démarche Six Sigma, en passant par les pratiques agiles, les auditeurs découvriront les outils et les méthodes qui révolutionnent la manière dont les organisations abordent l’amélioration continue.
En explorant des thèmes tels que l’innovation, la culture d’entreprise et l’engagement des employés, Norman et Mathieu offrent des perspectives inspirantes et des conseils pratiques pour naviguer dans le monde complexe de la transformation organisationnelle.
Que vous soyez un professionnel de l’agilité en herbe ou un vétéran de l’excellence opérationnelle, cet épisode vous invite à repenser vos approches et à découvrir de nouvelles façons de propulser votre entreprise vers le succès.
Un échange entre passionnés dans l’univers de l’agilité et du Lean Six Sigma !
Écoutez dès maintenant l’épisode complet sur Pyxis – Le Podcast.
Liens utiles :
- Site Internet
- Formation Lean Six Sigma White Belt (e-learning gratuit) : Cours White Belt
- Profil LinkedIn de Mathieu
- Dégustation Lean Six Sigma – Radisson Hotel | Bruxelles – 21 mars 2024 – Session d’introduction de 19h à 21h : Dégustation Lean Six Sigma.
Séquençage du podcast :
- [00:00:17] Introduction
- [00:00:29] Présentation de Mathieu Gendaj
- [00:01:52] Les stéréotypes au sujet du LEAN
- [00:03:22] Différence entre LEAN et LEAN SIX SIGMA
- [00:06:19] Des couleurs mode ceintures de couleurs…
- [00:08:30] The Six Sigma Company
- [00:09:34] Choisir entre Agile, Lean ou Lean Six Sigma
- [00:12:01] Les mesurables
- [00:15:09] Les SLA
- [00:17:14] La satisfaction client
- [00:18:36] Impliquer les gens de terrain
- [00:20:35] Savoir qui est son client
- [00:22:05] Le UX interne aux équipes
- [00:24:46] Former pour rendre autonome
- [00:27:32] Le premier point d’entrée
- [00:29:50] Les premières étapes
- [00:31:39] Combien de temps dure une mission
- [00:33:37] Un e-learning pour découvrir le Lean Six Sigma
- [00:34:44] Comment contacter Mathieu Gendaj
- [00:35:33] Invitation à laisser un message vocal et clôture du podcast
Transcription de l’épisode podcast :
Norman Deschauwer: [00:00:17] Bienvenue au podcast Pyxis. Aujourd’hui, on reçoit Mathieu, Mathieu Bienvenue!
Mathieu Gendaj: [00:00:22] Merci de l’invitation.
Norman Deschauwer: [00:00:23] Aujourd’hui, on va parler « Lean Six Sigma », waouh!
Mathieu Gendaj: [00:00:27] C’est la classe!
Norman Deschauwer: [00:00:29] Oui, oui. Ben je vais te laisser te présenter, c’est qui Mathieu ?
Mathieu Gendaj: [00:00:31] Donc moi je m’appelle Mathieu, Mathieu Gendaj, papa de deux enfants, ingénieur de formation à l’ULB et j’ai commencé ma carrière chez Toyota Motor Europe, à Evere, et c’est là que je suis tombé dans le Lean quand j’étais petit. Certains connaissent peut-être le Lean comme étant le Toyota Way hein, la redéfinition du Toyota Way. Depuis déjà maintenant plus d’une vingtaine d’années, je suis tombé dans la logique du Lean et maintenant je suis formateur et coach dans une entreprise qui s’appelle « The Lean Six Sigma Company », qui comme son nom l’indique, est spécialisée en Lean et Six Sigma, en formation, accompagnement, déploiement dans les organisations dans toute une série de secteurs. Ce n’est pas que la production le Lean, on en parlera peut être un peu après, mais c’est aussi les secteurs de services. Heureusement d’ailleurs, parce qu’en Belgique, la production, il n’y en a plus beaucoup. (Norman Deschauwer: En Europe), en Europe oui, ah ça dépend, moi je suis aussi d’origine polonaise, je ne l’ai pas mentionné. Donc je suis partenaire pour la Belgique, la France et la Pologne de « The Lean Six Sigma Company » en Pologne là, il y a encore pas mal de production. Tout ce qui est partie de la Belgique est partie en Pologne. Moi, comme j’ai les deux côtés, ça va, je reste encore un peu en lien avec la production.
Norman Deschauwer: [00:01:32] Tu parles Polonais?
Mathieu Gendaj: [00:01:33] Je parle polonais, oui, oui, tout à fait et je parle aussi néerlandais parce que, voilà, « The Lean Six Sigma Company » est une entreprise belgo-belge aussi, donc on parle pas mal Néerlandais!
Norman Deschauwer: [00:01:43] Installée à Anvers
Mathieu Gendaj: [00:01:44] Le siège de notre entreprise est à Anvers, moi je suis à Tervuren mais proche de Bruxelles, j’ai travaillé toute ma vie à Bruxelles et environs, donc voilà.
Norman Deschauwer: [00:01:52] Je pense que c’est la première fois sur le podcast qu’on a vraiment quelqu’un qui va nous remettre l’église au milieu du village concernant Lean. Alors je te pose le cas, donc moi quand je pose la question à certaine audience de: est-ce que vous connaissez l’agile? Oui, et je creuse un petit peu, on me dit « Ah, j’utilise Jira », voilà. Donc parfois ça se limite à ça, « On a un Pro..ject Owner ou un Scrum manager », voilà donc il y a des stéréotypes et des lieux communs, on colle des post-it aux murs, voilà on est agile. Par rapport à Lean, on va peut-être rebondir sur le même genre de stéréotype, c’est quoi les stéréotypes de Lean?
Mathieu Gendaj: [00:02:27] Ben le stéréotype de Lean, ça va être: le Lean objectif c’est d’aller plus vite, de réduire les gaspillages, d’être productif et de presser les gens, les compresser, sortir plus, avoir du rendement, la vitesse, les process, le rendement, l’output au détriment des êtres humains, voilà, donc c’est parce que malheureusement certaines grandes entreprises de conseil, je n’vais peut-être pas les citer ici mais, quoique, je pourrais, utilisent des méthodologies, enfin sous le couvert du Lean, pour aller faire des restructurations des entreprises pour augmenter l’efficience. Or le Lean, comme je l’ai dit, provient du Toyota Way. Le Toyota Way c’est vraiment une philosophie d’entreprise, ça va être vraiment différent de cette logique court termiste que vont avoir certaines boîtes de conseil où le but c’est, voilà, on débarque, on reste avec des chronomètre pendant quelques semaines, toi, toi, toi et toi vous partez (Norman Deschauwer: Oui), c’est pas du tout ça! Le vrai Lean, comme certains parlent de vrai Lean, revenir aux sources, le Toyota Way c’est pas ça du tout!
Norman Deschauwer: [00:03:22] Ok, oui mais justement on va déconstruire, on va débunker tout ça. En amont, donc on a eu un petit échange et tu me disais: attention, Lean, Lean Six Sigma, c’est pas vraiment la même chose!
Mathieu Gendaj: [00:03:32] Le Lean, donc littéralement on va parler d’amélioration continue, on oublie souvent le deuxième pilier parce que donc le Lean, comme je dis, vient du Toyota Way. Il y a deux piliers dans le Toyota Way, le premier pilier c’est l’amélioration continue, le « Continuous Improvement ». Le deuxième pilier c’est « Respect for people », donc c’est le respect pour les individus. Donc ça, déjà, première chose dans le Lean, la plupart des organismes de conseil pensent qu’au premier pilier, l’amélioration continue, alors ils oublient que pour atteindre ce premier pilier, c’est indispensable de respecter chacun, de respecter les gens de terrain, de respecter les gens qui livrent des résultats, on va appeler ça le Gemba en lean, les gens de terrain, les gens qui font le job, donc ces gens-là sont au cœur de la philosophie. Ça, c’est ce qu’on va appeler le Lean, plutôt orienté Toyota, Japon, c’est de là que ça venait à la base, même si le terme Lean n’existait pas chez Toyota. J’ai travaillé six ans chez Toyota, j’ai jamais entendu le mot Lean parce qu’ils parlaient de Toyota Way, c’est la culture d’entreprise, de l’entreprise. Le Lean c’est les Américains, des docteurs, des professeurs américains: Womack et Jones principalement, qui ont écrit un livre « Lean Thinking », qui a repris un peu comment Toyota a fait pour faire mieux qu’eux. Mieux que General Motors, mieux que Ford, et donc là ils ont mis un mot anglais, Lean, qui signifie svelte au plus juste, littéralement c’est de là que c’est venu. Le Six Sigma, c’est tout à fait une autre histoire, ça vient de Bill Smith, qui est un ingénieur de chez Motorola. En 1986, il a gagné un award de la qualité, un award de la qualité qui est toujours distribué chaque année d’ailleurs, maintenant c’est ce qui est fait par l’ASQ, l’American Society for Quality, on a l’équivalent en Europe qui est la European Organization for Quality, donc c’est vraiment la référence en qualité dans le monde. Et Bill Smith a gagné un award avec sa méthode qui s’appelle Six Sigma, où l’objectif n’était pas, comme dans le Lean, de chercher à créer du flux en impliquant les gens de terrain, mais plutôt de réduire la variation. Donc le Sigma, je ne sais pas si tu as fait un peu de statistique dans ta vie, le sigma c’est la mesure de l’écart type, donc l’écart type c’est la manière de mesurer la variation dans un processus (Norman Deschauwer: Ok), donc en gros, ce qu’on cherche avec le six Sigma, c’est être constant en performance.
Norman Deschauwer: [00:05:31] Prédictible.
Mathieu Gendaj: [00:05:32] Prédictible. Donc si je travaille pour la Poste belge, un projet Lean va dire je vais essayer de livrer en 24 h en moyenne mes clients. Un projet Six Sigma ça va être: ok 24h, mais entre 23 et 25h, donc être constant en performance. Si je m’engage auprès de mon client de dire je te livre demain à 18h, c’est demain à 18h, c’est pas demain à 15h parce que t’es pas encore chez toi, et c’est pas après-demain parce que tu n’es plus chez toi. Or, si on regarde que la moyenne, ce qui est parfois un défaut dans le Lean, quand on regarde le flux, on regarde les moyennes. Mais quand on regarde la moyenne, on peut avoir 24h de moyenne, mais avec 12h la plupart du temps et puis parfois 48h, mais voilà, si c’était la veille de Noël et que tu as reçu ton cadeau de Noël le 26 au lieu du 24 ben dans ton client de processus, tu ne seras pas satisfait. Donc Six Sigma, parfois appelé aussi zéro défaut, constance, on va vraiment chercher à comprendre les sources de variation.
Norman Deschauwer: [00:06:19] Ok, ça se passe comment? Donc je sais que vous avez des formations, on parle de ceintures…
Mathieu Gendaj: [00:06:24] Alors oui, on parle de ceintures principalement en six Sigma d’ailleurs. Le Six Sigma, donc Bill Smith, ingénieur de Motorola, a eu beaucoup de succès. Et notamment il y a une entreprise qui s’appelle General Electric, Jack Welch, qui est le CEO de General Electric dans les années, fin des années 80, qui a décidé de déployer le Six Sigma dans son organisation. Pour le déployer, ils ont défini, c’était une approche très top-down, très à l’américaine, jack Welch a décidé: dans les deux ans, je veux que toute General Electric, un grand groupe qui va produire des systèmes d’air conditionné, des scanners médicaux, enfin ils font un peu à peu près tout, où il y a un peu d’électronique et d’électrique dedans, ils ont décidé de déployer en deux ans le Six Sigma dans leur organisation. Pour ce faire, ils ont mis en place une structure pyramidale, très top down hein, vraiment, qui vient du management avec une structure de Master Black Belt. Donc les ceintures sont comme au judo, au karaté, donc ça va du plus haut niveau qui est Master Black Belt, puis on a Black Belt, Green Belt, Yellow Belt. Dans certaines organisations, on va parler aussi de White Belt, ceinture blanche. Comme au judo, au karaté, il y a différentes ceintures, différents niveaux, on va graduellement monter en niveau en tant que améliorateur de processus. Donc c’est avoir des compétences d’améliorer des processus et donc, sous-jacent, d’être un bon agent du changement. Dans des sociétés comme General Electric, c’était directement lié à des postes managériaux, c’est à dire que tu ne pouvais pas être manager ou General Manager sans être Green Belt ou Black Belt. Ça voulait aussi dire que « Les Wanabee » on les appelait, ceux qui want a be managers, ceux qui veulent être manager, devaient passer leur ceinture avant. Et, pour passer les ceintures avant, on avait la nécessité aussi de faire des projets qui reposent sur une méthode, une méthode DMAIC: définir, mesurer, analyser, improve, control. Et cette méthode permettait de faire des projets avec une certaine rentabilité. Six Sigma, très américain, très orienté rentabilité. Lean philosophie plutôt du kata, kata de Toyota, la philosophie « Je veux faire grandir les gens pour que les gens, eux, m’amènent plus » que six Sigma c’est très américain, et donc les deux ensemble font le Lean Six Sigma. C’est pour ça que notre entreprise s’appelle « The Lean Six Sigma Company », on ne fait pas du Lean, on ne fait pas du Six Sigma, on fait les deux. Parce qu’on veut à chaque fois la rentabilité, mais on veut à chaque fois également le respect de l’humain.
Norman Deschauwer: [00:08:30] Ça fait combien de temps que ça existe, votre entreprise?
Mathieu Gendaj: [00:08:32] The Lean Six Sigma Company on existe depuis 2002, donc la maison mère, donc on a un groupe présent dans, il y a 29 partenaires dans le monde. Le groupe en 2002 a été créé aux Pays-Bas, à Rotterdam, c’est toujours là qu’on a le siège de l’organisation. En Belgique maintenant ça doit faire quinze ans, quelque chose comme ça, ben comme tout bon Hollandais ils ont d’abord commencé par le marché néerlandophone de Belgique, ça paraissait assez logique pour s’étendre. Et donc, avec mon partenaire Frederik Waeckens, on couvre maintenant la Belgique et puis on a maintenant la France aussi depuis maintenant six ans, etc, etc. Ça fait déjà quelques années qu’on existe.
Norman Deschauwer: [00:09:05] Vous êtes combien?
Mathieu Gendaj: [00:09:05] Au niveau mondial il y a 600 personnes environ, au niveau Belgique-France, on est dix personnes. Donc c’est encore un groupe à taille humaine, c’est surtout aux Pays-Bas qui sont nombreux, ils sont 35 aux Pays-Bas au total, ce qui pour un organisme de formation et d’accompagnement est quand même beaucoup. Parce que voilà, on ne fait pas du consulting pure, on n’a pas des gens à temps plein dans une organisation, on va vraiment former, accompagner, montrer aussi, faire des projets avec les clients et les coacher, ben donc voilà. Donc c’est un organisme qui grandit petit à petit, année après année, dans tous ces différents pays.
Norman Deschauwer: [00:09:34] Qu’est-ce que tu aurais envie de dire à quelqu’un qui se pose la question, bon nous on a testé l’agilité, où en gros on a même rien testé, on ne sait pas…. L’agilité ou Lean, Lean Six Sigma?
Mathieu Gendaj: [00:09:46] Je devrais prêcher pour ma chapelle normalement mais, je vais être un peu plus nuancé, je pourrais te répondre la petite boutade que j’aime bien dire: « Pourquoi prendre la copie quand on peut prendre l’original? », mais bon je suis sur une chaîne qui parle d’agilité donc je vais peut-être pas me permettre de dire ça (Norman Dechauwer: Oh tu peux, tu peux…). Ah voilà, non je rigole un petit peu parce que bon voilà, l’agilité est quand même, les concepts du Lean qui ont été transposé à la base plutôt dans les domaines de l’informatique, mais la réalité est beaucoup plus subtile que ça, c’est très complémentaire. Donc j’ai énormément de clients qui vont parler de déploiement Lean Agile par exemple, parce qu’en fait, je trouve que l’agilité a bien structuré toute une série de logiques et de rôles qui fonctionnent très bien dans tout ce qui est informatique, mais même au-delà, avec les rôles de Scrum Master, Product Owner etc. Je ne suis pas un spécialiste là-dedans, vous connaissez ça beaucoup mieux que moi. Mais le Lean a le grand avantage que, au-delà de la philosophie, donc c’est une philosophie d’entreprise, donc ça vient de Toyota, Toyota Way donc qui dit philosophie d’entreprise, ça va aller depuis à la définition des objectifs stratégiques annuels à cinq ans, à dix ans, jusqu’à des outils et des méthodes pour améliorer un processus dans une équipe de 5 à 6 personnes. Donc, il y a vraiment énormément d’outils dans la boîte à outils, en plus de la philosophie qui vont permettre quand même de mettre cela en place de manière très, très concrète. Donc voilà, je serais un peu, un peu nuancé, moi je pense que dans la dans l’IT, je remarque l’agilité me paraît être quand même clairement une bonne une bonne voie. Si vous avez des processus plutôt services, on va parler un processus de ressources humaines, un processus de production, un processus sales, le Lean ou le Lean Six Sigma aura quand même pas mal de sens. Je commencerais plutôt par le Lean que par le Six Sigma, pour être honnête, il faut un certain niveau de maturité pour passer au Six Sigma. Le Six Sigma pour, quand on parle de variation, rien que le terme ça fait un peu peur, on parle d’écart type, il y a un peu de stats derrière. Ce qui finalement va être assez proche des rôles de data Scientists, Business Analyst, donc être capable d’utiliser les données pour prendre des décisions, commencer par voir la philosophie: de se dire que chacun chaque jour peut améliorer quelque chose, c’est ce qu’on va appeler le kaizen: kai changer, zen je suis zen. Tu parles un peu japonais, tout le monde, tout le monde peut être zen, je change pour un mieux, je change, je suis zen, des petits changements au quotidien, chacun, chaque jour, ça c’est la philosophie, il y a des petits outils derrière, petites méthodologies qui permettent de mettre ça en œuvre.
Norman Deschauwer: [00:12:01] Quand tu parles de ça, justement, ça me fait penser à: il y a une mesure qui est souvent utilisée dans les équipes Scrum là en l’occurrence, ou Agile, parce que c’est pas tellement lié à Scrum, c’est la vélocité. Où, justement, on va essayer d’avoir une prédictibilité en mesurant quelque chose, voilà, la vélocité souvent les gens se posent la question « Ok, tu me parles de story points, mais ça fait combien d’heures? ». Ben là les heures elles sont invariables, donc comment tu veux mesurer sur base d’heures si tu sais qu’une semaine vaut sept jours, ou cinq jours, ben tu as le nombre d’heures. Et un autre concept qui me vient à l’esprit, c’est dans la pyramide, les cinq dysfonctions d’une équipe de Lencioni, l’inattention au résultat. Parce que souvent on peut aussi mettre en place ce genre de mesures, comme si l’objectif c’était d’avoir une mesure. Voilà, maintenant on l’a, donc on regarde plus, elle est là, il y a quelqu’un d’autre qui va faire attention à cette mesure. Est-ce que tu as ce comportement parfois…?
Mathieu Gendaj: [00:12:51] Oui, je pense à un comportement qu’on va retrouver, clairement, alors, donc en Lean on va parler de process lead time, de délai d’exécution de processus entre une commande client, que ce soit un client interne ou externe, j’aime bien donner des exemples de client interne. Un manager a besoin de recruter quelqu’un dans son équipe, le processus va commencer par l’envoi d’un petit email ou d’un descriptif de fonction vers le DRH jusqu’à la fin du processus qui est la personne a signé son contrat et elle commence à travailler. Donc là, on va typiquement mesurer ce process lead time, ce délai d’exécution de processus et se dire que entre le besoin et le besoin rempli, il va y avoir par exemple 18 semaines. Déjà, c’est toujours très intéressant de regarder ça parce que chacun a ses indicateurs, ses statistiques. Les RH vont dire ah bah non, nous on met six semaines à recruter, par contre le ressenti du manager c’est, au moment où Jean-Jacques est parti, il est parti le 3 mars et le nouveau qui est arrivé, il est arrivé quatre mois plus tard. Pourquoi? Parce qu’il y a déjà souvent une différence de données, parce que les RH c’est au moment où ils ont créé le poste dans SAP par exemple, le profil de fonction (Norman Deschauwer: Oui), c’est là que leur chronomètre commence. Que la vraie équipe, c’est au moment où il a entendu la démission de Jean-Jacques, il a entendu la démission, il va, le chronomètre il s’active à ce moment-là. Et donc c’est sur ça que c’est très intéressant, parce qu’un DRH pour avoir de magnifiques chiffres en disant « Moi, je recrute en six semaines ». Ouais mais, est-ce que c’est vraiment le ressenti du client interne ? Est-ce que le manager a vraiment les mêmes chiffres? Et donc déjà voir que les données fassent sens et parlent au client, qu’il soit client interne externe, qu’il ait le même ressenti, est-ce qu’il est satisfait du processus? On va parler de « Service Level Agreement » par exemple entre différents départements, et d’avoir surtout, à intervalles réguliers, des discussions avec vos clients. Déjà considérez, en tant que RH, que tout manager est mon client, c’est pas toujours le cas, un DRH peut se sentir omnipuissant dans son organisation. Il ne faut pas oublier qu’il a des clients, des clients internes qu’il doit considérer comme tel, comme un client externe. Et puis, oui la variabilité, oui je mets 18 semaines à recruter en moyenne par exemple, très bien, ça c’est plutôt côté lean, mais la variabilité est très importante parce que on va dire « Oui, mais j’ai un ingénieur dans l’équipe B qui est parti il y a six mois, il n’a toujours pas été remplacé et ça nous a fait perdre un gros client parce qu’on n’a pas pu livrer à temps ». Ben la variabilité c’est un recrutement sur dix qui s’est mal passé, plutôt le côté six sigma on n’est pas constant en performance, « Oui ok, mais c’est un qui nous a fait perdre 20 % de chiffre d’affaires parce qu’on n’a pas eu l’ingénieur important pour le gros contrat qu’on devait livrer fin mars et il n’était pas là ». Et donc c’est pour ça qu’on cherche à faire un peu les deux, à être fluide, mais être constant dans nos performances et éviter les cas extrêmes!
Norman Deschauwer: [00:15:09] Ça me parle parce que ça me rappelle un exemple de la SNCB, donc il y a quelques années, bon évidemment quand on parle de SLA, c’est clairement ben: théoriquement sur le site c’est noté je pars à 10h07, je devrais arriver à 11h08 mais j’arrive à 11h20. Donc la variabilité est quand même importante, et je sais qu’il y a quelques temps, donc moi je faisais le parcours Charleroi-Bruxelles, ils avaient tenté de réduire je pense de cinq minutes, mais en gros ils ont explosé leur SLA parce que ils arrivaient constamment en retard, et ils ont fait machine arrière. Comment tu vois les choses par rapport à ça?
Mathieu Gendaj: [00:15:37] C’est un très bon exemple, j’ai travaillé chez Infrabel pendant quelques années, donc je connais assez bien la problématique des chemins de fer. Mais clairement, donc tout dépend de la voix du client, parce que en Belgique, par exemple la SNCB, un train en retard c’est un train qui est plus de cinq minutes en retard, c’est considéré comme en retard. Mais une des super astuces de la SNCB c’est par exemple un train annulé, un train annulé n’est pas en retard, donc ça c’est déjà assez intéressant comme concept. Dans leurs statistiques, je travaillais chez Infrabel donc je voyais ils étaient à 85 % de trains à l’heure, donc déjà, les données tu leur fais dire ce que tu veux. Donc 85 % de trains à l’heure, Oui mais, les 15 % de trains en retard c’est lesquels? C’est ceux aux heures de pointe. Si tu regardais déjà la même statistique, tu peux en prendre une autre, combien de voyageurs sont à temps par jour? Là, tu chutes déjà à 60 %, parce qu’en fait les 15 % en retard, c’est ceux aux heures de pointe parce qu’il y a la jonction Nord-midi qui est saturée. Et donc en fait, les chiffres c’est, tu leur faire dire un peu ce que tu veux, mais pour moi, pour qu’un chiffre fasse sens, il doit être aligné avec ton client de processus interne. Donc typiquement ici, l’association des voyageurs là, se mettre d’accord sur la manière de mesurer qui parle à ton client. En Suisse, même autre exemple, un train en retard c’est une seconde en retard, au Japon aussi, c’est une seconde. Au Japon, un train qui est 30 secondes à l’avance c’est considéré comme un défaut également (Norman Deschauwer: Oui) parce qu’un train à l’avance, si tu avais une connexion, c’est un problème aussi, déjà il faut que ça parle au client. Toi tu prends ton train de Charleroi, si t’as une correspondance, cinq minutes, bah si justement il y avait quatre minutes avant le train précédent et que l’autre est parti une minute à l’avance, tu as juste raté ta connexion, tu seras pas satisfait comme client, donc ce qu’il faut viser, c’est la satisfaction du client. C’est ça la vraie étape un d’ailleurs de la philosophie Lean selon Womack et Jones, dans un livre que je recommande à tout le monde qui s’appelle « Lean Thinking » par Womack et Jones, super livre, il date un peu mais il y a eu trois ou quatre éditions donc il a bien mis à jour. Plus important, c’est de partir de la voix du client, que ce soit le client interne ou externe.
Norman Deschauwer: [00:17:14] Donnez-moi ce que je veux, quand je le veux, comme je le veux…Oui
Mathieu Gendaj: [00:17:16] Et interrogé à intervalles réguliers parce que, ça change, maintenant avec l’immédiateté qu’on a avec les applications, de voir les connexions entre De Lijn, la STIB et la SNCB, toi tu vas regarder: ton bus part à 12h32. Il y a quinze ans, on considérait que c’était normal d’attendre quinze minutes entre un train et un bus, maintenant les clients deviennent plus exigeants. Ils ont un besoin d’immédiateté, et s’ils ont pas ce qu’ils veulent ben ils vont prendre la voiture ou un taxi, ou ils vont trouver une autre solution, ou le vélo. Et ils vont trouver autre chose et ça va faire des clients insatisfaits et c’est pas ça qu’on cherche…
Norman Deschauwer: [00:17:43] Oui mais je pense, en effet, tu peux être insatisfait par le résultat de cette opération, du process, mais je pense que si tu combles aussi par la communication, ça règle beaucoup. Moi j’ai fait l’expérience, donc je suis allé à Berlin, c’était en décembre, et pour une fois j’ai utilisé Uber. Alors je n’aime pas le modèle Uber, mais je voulais tester, en gros parce que j’ai une conscience et une éthique, mais je ferai que ça en fait
Mathieu Gendaj: [00:18:05] C’est fiable hein…
Norman Deschauwer: [00:18:05] C’est fiable, tu sais quand il arrive, tu sais qui arrive (Mathieu Gendaj: Communiquer, oui), tu vois son parcours, au centime près tu sais ce que tu vas payer. Enfin, voilà, je pense que c’est un monde de différence entre les taxis classiques, où tu appelles et on te dit « Ah ben dans 1 h » hein? Mais, mais non!
Mathieu Gendaj: [00:18:20] Oui, tout à fait, tu as raison que: les attentes clients ce n’est pas que la ponctualité par exemple, si on rebondit sur cet exemple-là, ça va être la communication. Donc en général, il y a qualité, coût, délai, com, c’est un peu tout ce qu’attend un client, il ne faut pas que ça coûte trop cher. Parce que bon, on se plaint beaucoup de la SNCB, mais ils sont pas chers par rapport aux trains suisses, voilà!
Norman Deschauwer: [00:18:36] Je ne sais pas comment ils sont financés mais j’ai entendu une statistique où un Belge paye 100 € par an pour la SNCB, même s’il prend pas le train, tu vois?
Mathieu Gendaj: [00:18:44] Oui, oui tout à fait, c’est financé autrement. Oui, oui, je vois ce que tu veux dire, que en Suisse tu payes peut-être plus tes trajets mais tu payes moins dans le financement, oui, oui, il y a toujours des business model différents. Les attentes du client, la voix du client, ça ne va pas être uniquement du délai, du coup, ça va être de la communication, ça va être de la transparence, ça va être, ben voilà. Donc chaque client a des attentes différentes, on le voit chez nos clients industriels, ça paraît évident: tu produis, je sais pas moi, du papier, tu livres un client qui va faire des emballages pour Carrefour ou pour Amazon pour envoyer par la poste des colis, mais il ne discute même pas avec leurs clients pour voir s’ils sont satisfaits de la qualité du papier, tu es là « Mais c’est quand même la base, non? ». « Oui, ben de temps en temps on a des rebuts, mais on sait pas très bien pourquoi, on sait pas combien, on sait pas quoi, on parle pas avec eux », ouais ben les clients externes, voilà c’est une chose, il faut parler avec eux, déjà, et leur poser les bonnes questions. Et les clients internes, pareil. Moi je pense qu’il faut commencer par soi-même, de se dire, réfléchir dans mon job, ma fonction aujourd’hui, c’est qui mes clients? On a tous des clients, en tant que manager mon client c’est mon équipe par exemple, qu’est-ce qu’ils attendent de moi? En tant que manager ils attendent, je ne sais pas moi, de la communication, une visibilité sur leur plan de carrière. Ils attendent des choses, mais chacun est client de processus, mais aussi fournisseur de processus. Et donc d’ailleurs, pour un même processus, on peut parfois renverser les rôles hein? Donc, en tant que manager tu dois des choses à ton équipe, mais ton équipe te doit aussi des choses en tant que, voilà, donc chacun est clients et fournisseurs les uns des autres, donc ça c’est une notion qui est assez importante. Mais pour arriver à cette philosophie de chacun, chaque jour s’améliore, mais il faut aussi impliquer les gens de terrain et travailler sur leur bonheur au travail, c’est peut-être un peu grandement dit, mais on l’oublie beaucoup. Dans la petite maison Toyota, il y a au cœur, il y a les gens de terrain avec un grand cœur, on doit impliquer les gens de terrain parce qu’en fait, la vraie amélioration, c’est pas les directeurs généraux ou le General Manager qui va le faire. C’est la téléphoniste qui est en contact avec… celui qui met à jour l’application de la SNCB, ben il va mettre, si une fois il a oublié de mettre à jour que le train était en retard, c’est lui qui va avoir un impact sur: toi, qui ne voit pas la petite boule verte de quand mon train va arriver, c’est pas à jour, ben tu vas avoir une frustration. Donc c’est avec ces gens-là qu’il faut aussi travailler.
Norman Deschauwer: [00:20:35] Je retiens ça, je ne sais plus où je l’ai entendu, ça fait longtemps mais: « C’est celui qui fait qui sait ». Et donc tu vois, c’est prendre justement ce qu’on va appeler les cols bleus, ceux qui sont sur le terrain pour le (Mathieu Gendaj: Exact) et pas juste des cols blancs qui sont dans une réunion avec un grand cabinet de conseil, qui vont décider pour la boite comment elle va fonctionner. Et ça m’appelle aussi, donc nous on est souvent appelé par des départements IT ou des boîtes IT, et ben tu as une série de groupes de personnes comme des architectes, on leur parle de « Montrez votre produit », « Mais oui mais à qui? On n’a pas de client? », « Comment ça vous avez pas de clients? Et les développeurs qui sont là, c’est pas eux qui vont devoir appliquer vos stratégies, vos frameworks et tout ça, c’est eux qui les appliquent ». Ou quand une équipe de développeurs développe une API, un firmware, mais il y a quelqu’un qui va l’utiliser, oui c’est une machine, mais il y a des gens qui développent la machine qui doivent savoir comment on va fonctionner, enfin tu vois, je pense en effet, un des premiers trucs c’est de connaître c’est qui mon client, ou nos clients.
Mathieu Gendaj: [00:21:25] Oui, oui, mais ça peut être un utilisateur, ça peut être un user hein? Comme en Agile on se focalise beaucoup sur les utilisateurs, mais oui, mais il y a aussi comme tu dis, les clients internes, un architecte. Chacun livre, en gros quand tu envoies un mail avec une pièce jointe ou que tu mets à jour des données dans une base de données, c’est pour que quelqu’un les utilise derrière. Si personne les utilise, ben arrête hein, c’est que ça sert à rien (Norman Deschauwer: Ça c’est waste). C’est un gaspillage, un muda dans la philosophie Lean, si quelqu’un l’utilise derrière ben, même tu écris un rapport, tu écris un rapport, un reporting, qui li derrière? À quoi il sert, quelle est la valeur ajoutée ? C’est vraiment ça, réfléchir au client, et puis après toutes les étapes qu’on fait dans une journée, réfléchir à la valeur que ça apporte à la personne qui le reçoit. Si ça n’apporte pas de valeur, on arrête. Si ça n’apporte pas ce qui est attendu, on peut changer. Mais c’est vraiment ça l’idée générale.
Norman Deschauwer: [00:22:05] Un autre rôle aussi qui a été popularisé, je veux dire récemment. Alors je sais qu’ils vont râler quand ils vont entendre ce nom là, mais c’est le UX. Dans les équipes plus orienté développement software ou produits, produits et services, on fait souvent appel à des UX, qui eux justement ont cette préoccupation du client. Alors moi je trouve ça chouette parce qu’ils viennent aussi avec des innovations sur comment aller chercher du feedback et autres, mais pour moi ça crée justement de nouveau un proxy entre l’équipe qui développe le produit et l’utilisateur final, il y a un filtre qui se fait, c’est bien, mais je trouve que ça devrait être inclus dans l’équipe. Alors qu’il y ait une personne qui soit spécialisée là-dedans mais qui fait partie de l’équipe, ça, je vote pour. Mais quelqu’un à qui on délègue le fait d’aller voir les utilisateurs, il n’y a rien de tel que de savoir que: ce que j’ai développé, ça plaît ou pas. Parce que ça va t’influencer dans la suite du développement.
Mathieu Gendaj: [00:22:55] Ce que tu dis est tout à fait correct, donc c’est, en général, dans la philosophie Lean Six Sigma d’ailleurs, enfin, souvent pour lancer ou déployer du Lean ou du Lean Six Sigma, on va vouloir mettre en place un département excellence opérationnelle, amélioration continue, etc. Alors qu’en réalité, ben oui, c’est parfois nécessaire pour lancer la démarche, mais qui améliore c’est: chacun, chaque jour, dans son poste. Et donc, tu as beau essayer de créer un département, moi, d’ailleurs quand je travaillais chez Toyota, un exemple très simple, c’est le département qualité et excellence opérationnelle de Toyota, dans leurs objectifs annuels il était écrit « Notre but, c’est de ne plus être nécessaire » (Norman Deschauwer: Ah oui). Donc ça c’était déjà très clair, donc tu peux en avoir de manière temporaire pour lancer une démarche, un peu comme parfois tu fais appel à une société de formation ou de transfert, comme nous, pour apprendre à mettre les choses en place. Mais notre but à nous, en tant que The Lean Six Sigma Company, c’est d’être inutile, ce qui est différent d’une société de conseil qui font rire avec leur chronomètre, leur but c’est de rendre, de créer de la dépendance. On améliore quand nous on vient et quand on s’en va, vous n’arriverez plus à continuer à améliorer, donc vous devrez nous rappeler dans trois ans pour ré améliorer et il y a une sorte de dépendance. Mais le vrai objectif de la philosophie, c’est que chacun, chaque jour à son poste, puisse ajouter de la valeur. Et donc toujours en partant de la voix du client, du client final, ou du client interne ou externe, d’ailleurs la philosophie Six Sigma on va parler d’arbres ACTQ, donc on parle de la voix du client, on regarde ce qui est critique dans la qualité d’un processus, et puis on va regarder finalement quelles sont les mesures les plus pertinentes qu’on va devoir utiliser dans nos process, avec nos équipes, mais chacun à son niveau, parce que chacun ajoute de la valeur. Et mettre un rôle externe en plus, ben c’est, l’exemple que tu me donnes là, c’est un peu plus proche du consultant qu’on va appeler qui va améliorer pour toi. Or, la meilleure personne pour améliorer, c’est celui qui fait le job au quotidien (Norman Deschauwer: Oui, oui, bien sûr). Et donc ce qu’on veut vraiment atteindre, c’est ça, après, je ne suis pas contre le fait d’avoir de manière temporaire, au départ, pour lancer la démarche, pour rappeler les bonnes pratiques, quelqu’un qui accompagne, tu l’appelles UX, tu l’appelles consultant en ligne, tu l’appelles comme tu veux, ça je pense ça peut être nécessaire pour changer la mentalité, et la philosophie d’une équipe.
Norman Deschauwer: [00:24:46] Moi je dis amen. Voilà, je suis tout à fait d’accord et on est franchement aligné avec ça, c’est que, évidemment, il y a des projets sur lesquels on dure, mais parce que le besoin change en fait en cours de route. Mais de me dire voilà, on va coacher une équipe pour qu’elle soit plus agile, alors déjà ça me…. Bref, je ne vais pas m’étendre là-dessus. Mais oui l’idée, tu peux suivre une formation et avoir la connaissance nécessaire pour démarrer, tu as besoin probablement d’un catalyseur, petite dédicace à Éric, pour démarrer, mais resté des années dans la même équipe ou dans la même organisation, pfff voilà…
Mathieu Gendaj: [00:25:16] Non, mais à un moment, enfin voilà, je pense que c’est pour ça qu’un formateur, accompagnateur, a comme objectif de se rendre aussi inutile pour qu’à terme, dans une organisation, ils ont leur propre blackbelt. Mais un blackbelt, de nouveau, c’est pas quelqu’un qui travaille dans le département excellence opérationnelle? Non, c’est dans la cellule achats il y a un expert, dans la cellule marketing il y a un expert, dans la cellule production il y a un expert, dans… Enfin dans chaque département, on a une structure, et des gens qui sont capables d’aider leurs collègues, qui font le même job qu’eux au quotidien, à s’améliorer en continu. Alors voilà le Six Sigma, il y a toujours cette notion de rendement, parce qu’on reste quand même dans la plupart des organisations très orientées « Il faut ramener de l’argent », donc ça c’est très américaine, très Six Sigma. Et dans le Lean, c’est aussi garder les gens, les rendre impliqués, les rendre bien dans leur travail, parce qu’en fait personne n’aime passer une journée, on se rend très vite compte en fait, quand on n’ajoute pas de valeur dans notre travail. Et il n’y a rien de plus démotivant, on parle de bourout, il n’y a rien de plus horrible que de passer une journée où finalement tu as ajouté aucune valeur. Tu as passé ton temps à aller rechercher le câble que tu avais oublié pour ton podcast dans la voiture….Non c’est un exemple, mais voilà, un petit exemple simple: tu as une bonne mallette, bien structurée, t’as ta checklist, c’était l’exemple je crois que Michel me donnait « Ça m’est arrivé d’avoir plus de batterie sur mon podcast et de perdre tout mon travail ». Mais ça, c’est des frustrations qui arrivent, ben parfois un peu s’organiser, une petite check list, un petit, ça va te permettre d’enlever à vie ceci, et puis si tu formes un petit jeune à faire des podcasts demain, ben il ne fera pas l’erreur non plus. Et donc ça te permet d’avoir des standards, ça peut parfois faire peur « Ça va, je ne suis pas un robot à appliquer des procédures », oui, mais non, c’est pour ramener de la sérénité dans les équipes en fait. C’est beaucoup plus simple, beaucoup plus serein d’avoir décrit le process, de regarder les étapes, d’enlever ce qui ne sert à rien, de se focaliser sur ce qui est utile, de faire des petits points d’attention quand quelque chose peut mal se passer, pour éviter que demain on refasse les mêmes erreurs qu’hier. Pour avoir travaillé notamment chez Infrabel pendant des années, il y avait un énorme stress parce qu’il y a eu une vague de départs à la pension dans les années 2010, des dizaines et dizaines de personnes. Mais pourquoi il y avait un stress, parce qu’il y avait rien d’écrit, tout était dans la tête des gens (Norman Deschauwer: Ah oui, oui). Tout était dans la tête de ces ingénieurs qui étaient là depuis 40 ans et qui connaissaient tout dans leur tête, une fois qu’ils sont partis, il y a eu un petit ingénieur de 24 ans qui est venu, qui devait tout reprendre, ben il a réinventé la roue à tous les niveaux, il n’y avait rien d’écrit, donc tu as perdu des pans entiers de savoirs parce que pas grand-chose était écrit. Là, ils ont évolué, ils ont mis en place un système ISO 9001 qui renforce d’ailleurs, on pourrait parler ISO 9001 une autre fois, mais le système qualité est renforcé (Norman Deschauwer: Tu reviendras) par l’amélioration continue et aussi renforcé par toutes les philosophies agiles et autres, donc, voilà.
Norman Deschauwer: [00:27:32] C’est qui votre persona? Donc je vais le dire comme ça, c’est qui la personne dans une organisation qui vient vous voir? Je parle pas forcément des formations, mais, voilà, une organisation veut du Lean, Lean Six Sigma, c’est qui qui vous appelle?
Mathieu Gendaj: [00:27:46] Alors très souvent ça part des départements qualité ou excellence opérationnelle, souvent ça part de là. Donc c’est justement ceux qui ont, ils ont fait de l’ISO 9001 pour avoir le joli petit diplôme dans le hall d’entrée, avec le cachet de bureau Veritas ou de quelqu’un d’autre, donc ça ils aiment bien. Puis ils se rendent compte qu’en fait, c’est bien d’avoir décrit ces process, mais on n’a pas vraiment réfléchi à les améliorer en continu, on les a décrit, on les a pas améliorés. Et donc souvent c’est ces départements-là qui viennent nous voir quand on parle vraiment de déploiement organisationnel. A côté de ça, il y a des individus qui veulent, eux, se grandir eux-mêmes parce qu’ils se rendent compte que ça a de la valeur ajoutée pour leur équipe, un manager local, un manager dans une équipe. Parfois ça commence aussi comme ça, donc on a un manager production qui se dit « Voilà, moi j’ai un objectif d’augmenter de 4 % ma production par rapport à l’année précédente », il va commencer dans son équipe, il va très vite se rendre compte que tout seul, il sait rien faire parce que la production ça va augmenter, que si la maintenance marche mieux et si la supply marche mieux, la logistique, la RH. Et en fait, très vite, il va devoir être obligé d’impliquer les autres, et souvent pour impliquer les autres il passe par un département type qualité, excellence opérationnelle, qui sont des départements transversaux. Donc souvent, voilà, nos premiers donneurs d’ordres ça va être, tôt ou tard on finit par parler avec eux, voir la direction, ça dépend de la taille des organisations. Il y a de nouveau Jack Welch de Général Électric, ben l’équivalent de Jack Welch ça peut être le CEO de Proximus, ou de l’entreprise que tu veux, qui a décidé d’amener de l’excellence et, de nouveau dans leur tête, ce n’est pas pour le plaisir hein? On va parler du coût de la mauvaise qualité, donc les défauts, jack Welch je te disais, il a voulu déployer pour augmenter la fiabilité de tous ces process mais pourquoi? Parce que quand on est fiable, on génère plus d’argent, parce que la variation, ça coûte énormément d’argent. Une petite erreur qui va faire perdre ton podcast, ça va te faire perdre 20, 30 % de productivité sur une journée. T’as même peut être, t’as fait une journée pour rien finalement. Et donc ces petites choses, donc l’idée des dirigeants, ben il n’y a rien à faire, il y a quand même toujours une notion un peu d’argent derrière. Après, l’idée des personnes, c’est aussi plutôt d’impliquer, pour garder les gens satisfaits dans leur boulot, un peu les deux côtés. Qui s’entrechoquent mais qui sont complémentaires en fait, parce qu’une boite qui tourne bien, ben finalement c’est beaucoup moins stressant d’être dans une société qui tourne bien, où il n’y a pas de combat entre départements, entre les baronnies, parce que j’ai connu dans certains de mes boulots, il y avait des combats entre barons, ben c’est pas gai quoi.
Norman Deschauwer: [00:29:50] Oui, surtout que maintenant on a ce qu’on appelle les marques employeur, donc les gens qui partent parce qu’ils sont pas satisfaits, ils vont faire une belle promo du gros merdier c’est dans la boîte, donc en effet, ça c’est important aussi. Imaginons un CEO d’appelle, ou un département qualité, je parle pas du process estimation, facturation, bref… Vous êtes sur le terrain, c’est quoi les premières questions que vous posez ?
Mathieu Gendaj: [00:30:09] Donc les premières questions, en général déjà on va dire on va faire ce qu’on appelle un « Go Gem Ba » visite terrain. Donc le terrain ça veut dire beaucoup de choses, si c’est une société qui a un call-center ben on va vraiment aller visiter avec les gens de terrain, regarder qu’ils nous montrent leur système informatique, on va écouter les irritants, les frustrations des gens de terrain, on va discuter avec le dirigeant pour voir ben, dans son bilan financier quels sont ses plus grandes problématiques. Est-ce qu’il a de la marge? Est-ce qu’il a des problèmes de rentabilité? On va essayer de voir sur le terrain la culture, est-ce qu’il y a de la visualisation, est-ce que les indicateurs sont visibles sur le terrain, sur un grand tableau derrière les équipes? Est-ce qu’on retrouve facilement un document? Est-ce qu’il y a des standards de travail qui existent? Est-ce que en trois clics, tu peux me sortir le standard de travail, me le montrer? Je le montre à la personne de l’équipe, lui dire « Tu le connais ce standard ou c’est juste pour l’ISO 9001 qu’on l’a écrit il y a cinq ans avec le responsable qualité? ». Vraiment essayer de voir le niveau de maturité de l’organisation, et en fonction du niveau de maturité, on fait aussi d’ailleurs des audits de maturité, audit de maturité Lean Six Sigma pour voir où ils en sont. Dans les organisations, on va identifier les écarts entre la situation souhaitée par le dirigeant de l’entreprise, ou le responsable excellence opérationnel, et le statut actuel, la baseline de où on part. Et puis on va mettre en place des axes pour se dire on veut améliorer tel, ou tel, ou tel, aspect qui sont ce qui nous posent le plus de problèmes aujourd’hui. Et après, ça passe souvent par de la formation et de l’accompagnement parce que, de nouveau on ne va pas faire ça pour eux, on va le faire avec eux. Mais il faut d’abord faire un constat de: c’est quoi vos plus gros problèmes dans l’organisation? C’est quoi les plus grandes plaintes de vos clients par exemple? Typiquement, déjà est-ce que vous collectez les plaintes de vos clients? Si oui, montrez les moi, c’est quoi vos plus gros problèmes? Et c’est vraiment comme ça qu’on va commencer.
Norman Deschauwer: [00:31:39] Ok, Cool. Et combien de temps dure une mission en moyenne, avec écart type?
Mathieu Gendaj: [00:31:44] Alors ça c’est une très bonne question. Une mission, ça peut être de quelques mois, deux, trois, quatre mois. Quand on va faire un petit audit, on va regarder les manquements, on va faire une formation pour une équipe, on va mettre en place un projet. Donc une formation, ça va être de trois jours pour une formation type Lean Practitioner, Practicien Lean, jusqu’à 6 à 10 jours pour plutôt Green Belt ou Black Belt. Et les projets sont des projets qui vont être de trois mois à six mois pour mettre un projet qui va, « Je vais réduire mon délai de recrutement de 18 semaines à quatorze semaines en six mois » par exemple hein? Donc ça c’est l’exemple d’un projet, donc ça prend quand même un tout petit peu de temps, ça va vite prendre entre six mois et neuf mois, un an pour faire une boucle d’amélioration, parce que, dans une organisation qui n’est pas encore mature. Après, il y a des clients qu’on a depuis six sept ans, pourquoi, parce qu’ils ont énormément de départements, on a commencé avec un premier département, typiquement le cœur de métier. Souvent, c’est là qu’ils veulent commencer, la production par exemple, si c’est un papetier il va commencer par améliorer sa production de papier, parce que c’est là qu’il se dit que c’est le cœur. Et puis on se rend compte « Bah oui, mais il y a aussi la maintenance. Ah oui aussi la logistique. Ah oui aussi les RH ». Et là on va, au fur et à mesure, embarquer d’autres gens, on essaie d’aileurs de leur dire dès le début « OK, oui, c’est le responsable production qui a lancé l’initiative, on va former douze personnes, on va en prendre six ou sept de la production, mais prend en commun de la maintenance, prend un des services achats » (Norman Deschauwer: Oui, oui). Parce que je peux vous dire que très vite, on va se rendre compte que c’est pas seul que vous pourrez améliorer. Et alors après on se rend compte qu’il y a beaucoup de problèmes dans les autres process aussi, supply, logistique, etc. Et donc là on va aussi commencer à accompagner d’autres équipes, mais les premières équipes qu’on a accompagné seront, par exemple, plus besoin de nous. Donc l’équipe prod, après un an, ils ont plus besoin de nous, on sera toujours occupé à les avoir comme client, mais ailleurs… Ou sur un autre site parfois, parce qu’on travaille beaucoup en France où il y a huit cinq lignes de production, une à Bordeaux, une à Marseille, une à Paris. Ben c’est pas parce que tu as amélioré l’usine de Bordeaux que ça passe mieux à Paris, il y a trois ou 400 personnes par site, c’est autre chose. Chaque équipe doit changer sa mentalité, donc ça peut durer longtemps. Beaucoup de clients qui sont récurrents, mais c’est pas les mêmes personnes à qui on parle.
Norman Deschauwer: [00:33:37] Est ce que tu as envie de dire quelque chose à l’audience? Un sujet que j’aurais pas couvert par mes questions ou une invitation, par exemple?
Mathieu Gendaj: [00:33:44] Si vous ne savez pas du tout ce que c’est le Lean Six Sigma, je peux vous inviter à découvrir le Lean Six Sigma. Donc on a, pour ça on a développé un petit module très simple qui est un e-learning qui s’appelle « Lean six Sigma White Belt », on mettra les coordonnées en référence si tu veux. C’est un qui dure 45 minutes, 1h, vous avez un petit certificat Lean six Sigma White Belt, la ceinture blanche, la ceinture d’entrée. Vous serez un tout petit peu plus la structure, les rôles de chacun, un peu mieux comprendre c’est quoi un Black Belt? Un Green Belt? Comment lancer la démarche? C’est quoi les premiers projets? Et je pense que ça peut être intéressant pour mettre le pied à l’étrier. Moi j’organise aussi régulièrement des webinaires et des dégustations Lean Six Sigma, il y en a une bientôt à Bruxelles, je me souviens plus de la date comme ça mais (Norman Deschauwer: On le mettra hein), voilà on le mettra. On organise ça régulièrement pour, ben justement, de se rencontrer en face à face parce que l’e-learning c’est bien si vous n’avez pas trop le temps et que vous regardez ça chez vous. Après, en général, c’est toujours mieux d’en discuter de vive voix. Et donc ça, on organise aussi assez régulièrement, et puis voilà, j’espère vous rencontrer à d’autres événements, peut-être un événement Pyxis, on en reparle?
Norman Deschauwer: [00:34:44] Oui, tout à fait. Si nos auditeurs veulent te contacter, comment ils peuvent le faire?
Mathieu Gendaj: [00:34:47] Pour me contacter on a, ben de nouveau on a, on mettra notre site internet en commentaire, il y a un formulaire de contact où vous téléchargez le catalogue: catalogue de formations d’accompagnement, ou formulaire de contact qu’on mettra en lien. Sur LinkedIn aussi, Mathieu Gendaj, moi je suis très actif sur LinkedIn, je publie aussi beaucoup de contenus, donc n’hésitez pas à me suivre, juste m’envoyer une petite invitation, ou follow, ou invitation. L’invitation c’est très bien, j’accepte souvent et puis ça permet d’échanger en direct, n’ayez pas peur de m’envoyer un message LinkedIn, je suis régulièrement dessus. C’est comme ça que j’ai rencontré Norman aussi, donc (Noran Deschauwer: Tout à fait) ça fonctionne.
Norman Deschauwer: [00:35:19] Est-ce que tu peux épeler ton nom?
Mathieu Gendaj: [00:35:20] Oui hein! Pas facile, donc Mathieu avec un T, M, A, T, H, I, E, U. Gendaj, c’est Gendaj déjà, personne ne le prononce correctement, donc c’est g, e, n, d, a, j, j comme Jean, voilà.
Norman Deschauwer: [00:35:33] Super, merci! Je rappelle aux auditeurs qu’on a un répondeur sur le site Vodio. Donc vous suivez les liens, vous allez sur Vodio, vous pourrez donc enregistrer un message pour Mathieu, ou pour l’équipe, et si vous mentionnez que vous acceptez qu’il soit diffusé sur le prochain podcast, on pourra le diffuser mais quoi qu’il arrive, ce message arrivera à Mathieu, merci à toi.
Mathieu Gendaj: [00:35:53] Ben merci pour l’invitation, c’est un plaisir en tout cas.
Norman Deschauwer: [00:35:55] Et à très vite. Au revoir à tous.
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